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Apprendre à écouter les clients avec la fenêtre de Johari

Dans les derniers mois, nous avons été impliqués dans des initiatives afin de mieux écouter les clients, comprendre leurs besoins, leurs attentes et préférences. Tout ça évidemment dans le but de les satisfaire davantage, de les garder et de développer leur loyauté. Nous avons aussi fait le même type d’exercice pour nous-mêmes. De ces projets, nous avons tiré plusieurs constats intéressants.

Très souvent, on pense manquer d’information sur nos clients. 
On envisage des initiatives importantes, on contemple et analyse des plateformes pour développer cette connaissance qui va nous permettre de mieux rejoindre nos clients.

Souvent, on a beaucoup plus d’informations que l’on ne le pense.
Toutes les organisations rencontrées à ce jour dispose d’une mine d’or d’information sur ses clients, actuels ou futurs qui lui permettrait d’améliorer considérablement sa relation avec eux :

  • Commentaires de sondage
  • Études réalisées par des firmes spécialisées
  • Équipe en communication constante avec les clients
  • Commentaires de clients sur les media sociaux
  • Plaintes fermées


La liste est longue.

Pourquoi ne voyons-nous pas ce qui est devant nous?

Nous sommes pourtant des êtres rationnels. Et nous sommes tous engagés à améliorer la satisfaction de nos clients et à faire croître nos revenus. Comment est-ce donc possible alors que nous ne voyons pas ce qui est devant nous? Une restructuration de la perception de nos connaissances est nécessaire pour faire le tri de nos pensées.

C’est là qu’intervient le concept de la «Fenêtre de Johari organisationnelle».

Celui-ci distingue 4 cadrans ou zones dans nos perceptions de la réalité:

  • Ce que tout le monde sait de notre compagnie – La zone d’ouverture
  • Ce que nous dirigeants et employés savons de la compagnie, et qui est caché aux personnes externes – La zone cachée
  • Ce que nos clients savent (et souvent aussi nos partenaires) et que nous ne voyons pas – L’angle mort
  • Ce qui est caché de tous – La zone inconsciente

La zone d’ouverture

Cette zone concerne ce que les clients savent de l’organisation et que nous savons aussi : notre vision, nos produits et services, notre réseau de distribution en fait généralement partie. Plus cette zone est étendue, plus la relation avec les clients est authentique et donc idéalement on cherchera à l’étendre le plus possible.

La zone cachée

La zone cachée, c’est tout ce que l’organisation garde pour elle et ne communique pas à ses clients, soit consciemment, soit inconsciemment.

On y trouve l’histoire réelle de l’organisation, sa culture interne, ses secrets, mais aussi ses forces et ses talents cachés aussi. C’est une source inestimable de croissance pour l’organisation. Pour se mettre à l’exploiter, il faut souvent attendre l’arrivée de nouvelles personnes qui vont porter sur l’organisation un regard neuf et extérieur. 

L’angle mort

Ce que nos clients et les personnes externes à l’organisation savent ou perçoivent, et que nous ne semblons pas voir, c’est notre angle mort. On y trouve la mine d’or de commentaires clients que bien souvent on ne voit plus. Ce n’est pas vraiment caché. C’est juste que nous ne le voyons pas. Notre travail, comme leader ou comme partenaire de ces leaders, consiste alors à lever le voile sur cet angle mort; avec bienveillance, mais sans complaisance.

Il y a souvent de belles surprises, lorsqu’on découvre que nos clients adorent certains aspects de nos services et qu’on ne l’avait pas réalisé par exemple. Il y a aussi de moins belles surprises, où on réalise qu’on n’est pas aussi bon qu’on le pensait. En réalité, il n’est pas rare de se dire qu’en fait on le savait. Il y a certaines choses qu’il est parfois plus simple de ne pas regarder; on est aussi humain après tout.

La zone inconsciente

La dernière zone est la zone privilégiée des projets qui visent à mieux écouter les clients, à découvrir leurs besoins, leurs attentes et leurs préférences. Le concept de zone inconsciente s’applique à merveille, car comme on le constate souvent, les clients ne savent pas toujours ce qu’ils veulent. On a tous en tête la célèbre phrase de Ford («si je demandais aux clients ce qu’ils veulent, ils diraient des chevaux plus rapides») ou même l’attitude de Steve Jobs qui arguait que les clients ne savent pas encore ce dont ils auront envie demain.

Les besoins, les désirs, eux, existent bien et sont présents. Comme client, nous n’en sommes juste pas conscients et ils ne sont pas actualisés avec la technologie existante ou en devenir, dont nous ignorons parfois les possibilités. Le travail consiste alors à identifier ces besoins et ces désirs, en se plaçant à des niveaux d’abstraction souvent plus élevés d’ailleurs. Cela nécessite de faire les choses autrement. Le meilleur exemple concerne les groupes de discussion dont l’incapacité à saisir ce que les clients veulent vraiment a déjà maintes fois été commentée. 

Conclusion : écouter les clients, un projet de changement

Écouter les clients, c’est avant tout un projet de changement, dans lequel on vient modifier nos perceptions que :

  • Nous comblons déjà tous leurs besoins,
  • Nous connaissons ce qu’ils veulent (parfois mieux qu’eux),
  • Nous devons faire de grands changements pour les rejoindre,
  • etc…


Pour accompagner dans le changement, prenons le temps d’apprécier les phases impliquées.

Ce changement dans les perceptions doit être géré : c’est un déséquilibre qui nous rend vulnérable comme leader et peut nous amener bien des émotions : déni, choc, colère, culpabilité… Disons qu’on passe au travers de toutes les étapes du changement !

C’est la grande valeur de ce concept de la Fenêtre de Johari appliqué dans le cadre de la relation client : il met parfaitement en évidence les véritables enjeux de ces initiatives; et comme souvent, ils sont avant tout humains.

Comme lorsque le concept est appliqué au niveau des individus, agrandir la «zone d’ouverture» demande des efforts. Ces efforts ne sont pas de l’ordre de la recherche d’information et des outils, mais bien de l’ouverture qu’on se donne à voir le monde différemment, avec le regard de nos clients. C’est un travail qui demande de la détermination, du courage et aussi beaucoup de bienveillance envers soi.

Par Guillaume Delroeux

Guillaume est président et leader de pratiques en expérience client chez Prométhée consultants et aide les organisations ayant des centres de relations clients à tirer le meilleur parti de leurs technologies pour maximiser leur impact et créer des expériences client légendaires.